Rheannon Demeter
Pour mon successeur
J’ai l’impression d’être impuissantedans leurs Louboutinsdans leurs combinaisons Nikeavec leurs Rolexportant leurs sacs à main Guccien face de biens matériels modernes, indicateurs de succèsen face d’objets impermanents qui contrôlent nos viesJ’ai l’impression d’être impuissantene possédant que la certitude du passé et de l’espoirpour combler l’incertitude du futurdans ce monde fixé sur la formalitéqui recule tout en avançant vers sa finJ’ai l’impression d’être impuissanteEn face de traumasqui me détruisent, et quiforment ma personneJ’ai l’impression d’être impuissantene sachant si l’existence précède l’essenceou s’il vaudrait mieux attendre la délivranceprise parmi les personnes qui prétendent être perduesdans leurs quêtes de sens pour dévoiler l’inconnuJ’ai l’impression d’être impuissanterépondant à toute exigence sociétalejusqu’à ce qu’ils me récompensent avecun peu de respect et de reconnaissanceet des offres de travail avec un salaire insultantJ’ai l’impression d’être impuissanteétant une visionnaire objectiviste alourdie par les chaînesde leurs manières anciennes qui retardent le futurde leur subjectivité moderne qu’il faut respecterpendant que les sains continuent de souffriret ce n’est qu’en mourant qu’on se sent enfin libreJ’ai l’impression d’être impuissanteparmi eux humaineparmi eux citoyenneparmi eux docileje suis née pour mourir sans colorier à l’extérieur des lignesdans le pays de-la-li-ber-té |
*Pastiche du poème « Solde » de Léon-Gontran Damas
À propos de l’auteure
Rheannon Demeter fait son baccalauréat à l’Université de Toronto avec une majeure en apprentissage de la langue française et des mineures en éducation et société et en études françaises. Elle s’intéresse à la poésie et aime explorer les thèmes philosophiques de l’existentialisme et de la réalité à travers ses écrits.